On s’imagine toujours que l’histoire, avec un grand H, ne s’apprend que par l’enseignement scolaire ou bien les ouvrages de référence (en se payant un petit roupillon entre deux dates qui n’ont aucune signification pour nous). J’ai une petite nouvelle pour vous : l’histoire se trouve autour de vous, à portée de main. Vous en faites également partie. Vous ne vous en doutiez pas, n’est-ce pas?
Peu de gens savent que des religieuses canadiennes furent détenues dans un camp de concentration allemand durant la Deuxième Guerre mondiale, et pourtant. Il n’est pas nécessaire de se taper une encyclopédie sur le sujet pour l’apprendre. Non. Il vous suffit de lire le touchant récit de Lise Dion dans « Le secret du coffre bleu », histoire inspirée de textes écrits par sa mère dans de simples cahiers et retrouvés dans un banal coffre bleu après son décès.
Pour plusieurs, les gens ayant eu une incidence sur le développement de la société ont automatiquement eu des vies exceptionnelles dont les accomplissements furent grandioses. En réalité, ces personnes d’exception désiraient souvent uniquement améliorer leur propre sort. C’est le cas de Janette Bertrand et de sa bataille constante pour se prouver qu’elle n’était pas « juste bonne à faire des tartes » (sic). Saviez-vous qu’elle était dyslexique? Étiez-vous au courant qu’elle écrivait tous les textes des pièces de son mari, Jean Lajeunesse, et qu’il en prenait tout le crédit? Cette personne très peu sure d’elle-même, malgré tous ses succès, et ayant un très grand besoin d’amour (encore aujourd’hui) a permis à la femme québécoise de sortir de sa cuisine. Par son cheminement artistique, elle a inspiré des générations de femmes. Elle a changé l’histoire. Son livre intitulé « Ma vie en trois actes » nous dévoile la femme fragile et inquiète qui se cache derrière la personnalité publique, tout en faisant état de la réalité de la société québécoise de l’époque.
C’est également ce que j’ai fait en écrivant « Doux souvenirs au temps de Duplessis »; la connaissance d’un pan de notre histoire par un récit concret. On ne connait de cette époque que les scandales. Toutefois, la politique du gouvernement Duplessis a entre autres permis l’électrification des campagnes, figées dans le dix-huitième siècle, et le développement des régions rurales laissées à elles-mêmes. L’emprise de la religion était totale et plusieurs enfants eurent un destin tragique en étant soit placés à l’orphelinat, dans des institutions psychiatriques ou bien sur des fermes afin de servir de main d’œuvre gratuite. Toutefois, derrière toute cette négativité, une histoire positive a éclairé un peu la noirceur qui plana sur les quinze années de règne de Maurice Duplessis. C’est ce que j’ai relaté avec le touchant récit d’un petit garçon et de sa sœur placés chez des étrangers. Bien que la vie sur la ferme ne fût pas facile, ils furent aimés et échappèrent à un destin qui aurait pu être affreux.
Ce sont quelques exemples de pages d’histoires qui sont écrites avec humanité et émotion et qui parlent de tout un chacun, de gens « normaux » pourrait-on dire. Vous sortirez de ces lectures avec une meilleure connaissance du passé qui a forgé votre présent, sans avoir cogné des clous, tout en profitant d’un récit qui vous reviendra souvent à l’esprit. Vous connaitrez des gens que vous n’auriez jamais connus autrement. Leurs vies, leurs réalités, c’est également celle de tout un peuple, de votre patrimoine.
Arrêtez de traiter les souvenirs de vos ainés comme du babillage sans importance. Ils sont la richesse de notre peuple, les vestiges vivants de notre histoire. Invitez vos parents, vos grands-parents, vos tantes ou vos oncles, peu importe, à votre table. Préparez-leur un beau repas et, entre le service des carottes et des patates, demandez-leur de vous parler de leur vie. Couchez leurs souvenirs sur papier et conservez-les précieusement, comme les trésors qu’ils sont.
* La graphie rectifiée est appliquée à ce texte.