Critique littéraire – D’après une histoire vraie

Synopsis (quatrième de couverture)

« Encore aujourd’hui, il m’est difficile d’expliquer comment notre relation s’est développée si rapidement, et de quelle manière L. a pu, en l’espace de quelques mois, occuper une place dans ma vie. L. exerçait sur moi une véritable fascination. L. m’étonnait, m’amusait, m’intriguait. M’intimidait. […] L. exerçais sur moi une douce emprise, intime et troublante, don j’ignorais la cause et la portée. »

Commentaire précritique

Ce qui est le plus intriguant à propos de ce livre, que j’ai lu en format poche, est : comment diable s’est-il ramassé dans une boite de plastique à la cave, où je garde seulement quelques livres en format papier (je donne habituellement mes livres soit à la donation du village les dépose dans diverses boites à livres) ? Premièrement, ce n’est pas du tout mon genre de lecture habituel et je ne connaissais pas du tout cette autrice française. La seule option qui m’est venue à l’esprit est qu’il provient d’une voisine de mon père, qui lui donne parfois des livres pour moi pour une raison inconnue. Pourquoi l’ai-je gardé ? Ça, c’est une bonne question. Peut-être est-ce parce qu’il était écrit en caractères assez gros pour un livre de poche (je me suis débarrassée de plusieurs livres, car les caractères étaient décidément trop petits ; je vieillis mes ami·e·s !).

Critique

Je suis très heureuse d’être passée outre le fait que ce livre, présenté comme une autofiction[1], me sortait de ma zone de confort. L’écriture de l’autrice est simple et complète à la fois, laissant couler les mots avec une facilité déconcertante et très plaisante. J’ai même souligné plusieurs passages qui sont venus me chercher pour une raison ou une autre (reproduits à la fin de ce texte). L’histoire d’une femme, qui se sent comme un imposteur, autant en tant que personne qu’en tant qu’autrice. Pour une fois, un livre qui parle de l’emprise d’une personne sur une autre, mais du point de vue de l’amitié soudaine et improbable entre deux femmes au lieu d’une histoire romantique qui tourne au cauchemar. Bien que je n’aie jamais été populaire en tant qu’autrice, j’ai tout de même publié sept romans et plusieurs histoires ; n’en déplaise à plusieurs, je me sentais donc très concernée par l’histoire de cette autrice, désormais incapable d’écrire une seule ligne, moi qui ai abandonné l’écriture après la publication de « Malaimés », le dernier tome de ma trilogie policière. Je me sentais aussi un lien avec cette femme qui se trouve inadéquate sur plusieurs points, admirant celles qui semblent savoir où elles vont et qui elles sont avec facilité, et dont le charme et la sophistication semblent couler naturellement au lieu d’être une bataille constante.

Avertissement : divulgâcheur

Je suis incapable de donner mon opinion complète sur ce livre sans mentionner des éléments qui vendront la mèche ; donc, si vous êtes intéressés par ce roman — que je conseille fortement d’ailleurs — mais que vous ne voulez pas en savoir trop, ARRÊTEZ-VOUS ICI !

Donc, je croyais en cette autofiction, en cette autrice qui avait perdu l’inspiration et qui avait rencontré, par hasard, une femme rapidement devenue une amie qui semble lui vouloir du bien, mais qui s’immisce dans sa vie à son corps défendant. Une manipulation psychologique comme on peut le voir souvent entre un homme et une femme, mais qui survient ici entre deux femmes liées par l’amitié et la passion de l’écriture et non pas par l’amour et la romance. Plus ma lecture avançait, plus je pensais à « Misery » de Stephen King… et vlan, aux deux tiers du livre, un chapitre qui commence par une citation provenant de cette œuvre. Ensuite, l’histoire devient si disproportionnée, l’emprise de L. — l’amie machiavélique — si forte, que je commence à avoir des doutes quant à la véracité de cette histoire qui, je vous le rappelle, s’intitule « D’après une histoire vraie ». Et là, je pense à « La part des ténèbres », toujours de Stephen King. Est-ce que cette amie, cette fameuse L., existe vraiment ? Est-ce l’autrice qui fabule ? L’a-t-elle inventée de toute pièce afin de justifier son incapacité à écrire, à interagir avec ses amis, à passer outre son blocage artistique et, quelque part, par-dessus sa culpabilité d’avoir écrit un bestseller basé sur une histoire vraie, le succès qui la paralyse désormais ? Dans le livre, on revient souvent à la définition réelle d’une histoire vraie, surtout vers la fin. Et là, on comprend (en tout cas, moi j’ai compris) : toute cette partie concernant L. est complètement fausse et seul le blocage littéraire après le succès de l’autrice est réel. Elle s’est servi de ses angoisses et de ses lectures pour écrire « une histoire vraie » qui n’en ait qu’une qu’en surface. J’aurais pu me sentir trahie et trompée après ma lecture, lorsque j’ai parcouru le web pour voir si j’avais bien saisi l’essence de ce livre au titre fallacieux. Mais non, j’ai salué l’ingéniosité de l’autrice, son audace, et je l’ai silencieusement remerciée pour tous les points de réflexion qu’elle m’a fournis tout au long de ma lecture. Qu’est-ce qu’une histoire vraie au fond ? Car, au fond, toute part de livre a quelque chose se rapportant à nous. On écrit avec notre expérience de vie, avec nos connaissances, avec nos peurs, avec nos espoirs et nos doutes. Quelque part, un livre fictif contient toujours une part de vérité, non ?

* Citations

« Aujourd’hui, je sais que ce n’est pas seulement une affaire de disponibilité, mais plutôt de genre, quel genre de femme l’on choisit d’être, si tant est qu’on ait le choix. »

« […] j’ai gardé, je crois, ce regard sur les femmes : une réminiscence de ce désir d’être une autre qui m’a si longtemps habituée. Un regard qui va chercher, chez chacun des femmes que je croise, ce qu’il y a de plus beau, de plus trouble, de plus lumineux. »

« C’était la rentrée. L’heure des fournitures neuves et des bonnes résolutions. Ce moment du commencement ou du recommencement. »

« Ce livre était un aboutissement, une fin en soi. Ou plutôt un seuil infranchissable, un point au-delà duquel on ne pouvait pas aller, en tout cas pas par moi. Après, il n’y aurait rien. La fameuse histoire du plafond de verre, du seuil d’incompétence. […] j’avais, sans le savoir, écrit mon dernier livre. Un livre au-delà duquel il n’y avait rien, au-delà duquel rien ne pouvait s’écrire. »

« Ton livre caché, mois je sais ce que c’est. […] Si tu ne l’écris pas, c’est lui qui te rattrapera. »

« […] pouvons être totalement dupes d’un livre qui se donnerait à lire comme la vérité et ne serait qu’invention, travestissement, imagination. […] Multiplier les effets de réel pour faire croire que ce qu’il raconte a eu lieu. »

« D’ailleurs, ce pourrait être un projet littéraire, écrire un livre entier qui se donnerait à lire comme une histoire vraie, un livre soi-disant inspiré de faits réels, mais dont tout, ou presque, serait inventé. »


[1] D’après le dictionnaire Larousse, « l’autofiction est une autobiographie qui emprunte les formes narratives de la fiction ». L’autofiction est donc un genre littéraire qui consiste à parler de soi, à l’instar d’une autobiographie, mais en romançant sa propre histoire.

Critique littéraire : Du diesel dans les veines (la saga des camionneurs du nord)

Synopsis (provenant du site de l’éditeur)

«Plutôt que de toucher le fond de l’ignorance et de l’ennui, les routiers goûtent à un plaisir de nos jours interdit: prendre le temps d’être avec soi. Aller au fond des choses. Ils savent un secret très ancien: celui de la durée.»

De novembre 1975 à octobre 1976, Serge Bouchard a voyagé avec des camionneurs dans le Nord-Ouest québécois. Son but: étudier et observer leur travail pour en faire le sujet de sa thèse de doctorat. Serge Bouchard et Mark Fortier ont transformé la matière de cette recherche ethnographique unique en un portrait vivant et pénétrant du monde des routiers.

Il y est question de mouvement, de routes et de béton, mais aussi des célèbres «truck stops» où domine le personnage de la «waitress», de marginalité, d’infini, de solitude, d’accidents et, surtout, du plaisir d’être camionneur. Le regard de Serge Bouchard transforme la machine et son chauffeur en véritables personnages. Chacun a son histoire, ses cicatrices, son usure, sa musique. On peut parler comme un camion, avec une grosse voix tranquille, de la même manière que les conteurs innus savent parler comme un ours.

Ce livre nous entraîne bien au-delà des routes du Nord à l’époque des grands chantiers de la Baie-James. Il nous parle des mystères de la vie, de la liberté et de la création.

Avant-propos

Ce livre m’a été prêté par mon père, un camionneur retraité. Je croyais tout savoir (ou presque) de mon paternel – après avoir écrit un livre sur sa jeunesse, on l’aurait cru! (Doux souvenirs au temps de Duplessis), mais j’ai découvert au fil d’une conversation qu’il gardait toujours un petit jardin secret, qu’il dévoile au gré de sa fantaisie (petit coquin!). Donc, mon cher père m’a avoué qu’il avait travaillé comme camionneur à la Baie James dans les années soixante, avant que le projet de barrages comme tel commence. Durant notre conversation, il m’a donc prêté ce livre et un autre sur la Baie James (dont je ne ferai toutefois pas la critique).

Critique de l’œuvre

Bravo aux auteurs, (feu) Serge Bouchard, anthropologue, et Mark Fortier, sociologue. À deux, ils ont su extraire judicieusement d’une thèse de doctorat complexe écrite il y a une quarantaine d’années un livre à savourer, que vous soyez camionneurs ou bien un membre de la famille de l’un de ces derniers (ou simplement si le sujet vous intéresse). Ce livre a été publié il y a quelques années seulement, mais on ne sent rien d’anachronique, le phénomène du « truckeur » étant en quelque sorte intemporel.

Ce livre fait l’éloge de ces hommes (eh oui, à l’époque il n’y avait pas de femmes dans le domaine!) dédiés à leur mastodonte et à la route, qu’elle soit en asphalte, en gravier ou en terre battue, sous le soleil, la pluie ou la neige. Plusieurs passages pourtant terre à terre ont quelque chose de poétique. Un court extrait en exemple :

Si la solitude n’était pas pour lui une source d’autonomie et de solidarité, si son isolement ne le plongeait pas dans de profondes méditations, si l’idée du travail n’était pas chez lui celle d’accomplir des prouesses, s’il n’éprouvait pas une véritable joie à conduire sa machine, l’indépendance du truckeur ne serait qu’une illusion désolante. Une fausse conscience. Une tromperie qui masquerait les sacrifices et les souffrances de son travail. Le camionneur serait tombé dans un traquenard : se croyant libre, il serait un força. Il purgerait à son insu une peine de travaux forcés dans une prison rutilante.

N’est-ce pas bien dit?

Pour avoir accompagné mon père à quelque reprise sur la route, j’ai reconnu son comportement en entrant dans un « truck stop » se trouvant sur sa « run » : une familiarité avec l’endroit qui devient, quelque part, la maison loin de la maison le temps d’un repas sur le pouce. Le bon vieux temps où le camionneur, fier de son statut, arborait fièrement son nom ou le nom de son camion sur une plaque sur le nez de son mastodonte; où lui et ses congénères discutaient en « code » sur le CB, objet nécessaire pour rester connecter au reste du monde.

Ce livre comporte également de nombreuses anecdotes de camionneurs routiers, qui rend le tout plus intime. Je suis certaine que, une fois que vous aurez lu ce livre, vous ne direz plus « maudit camion! » sur la route et que vous y penserez à deux fois avant de manquer de respect envers ceux qui, par leur travail acharné, nous permettent, encore aujourd’hui, de ne manquer de rien. Ils sont les rois du bitume; démontrez votre déférence en ayant de la courtoisie envers eux sur la route. Vous y êtes peut-être pour un petit 15, 30 ou 60 minutes, mais eux y passent 10 à 15 heures (et c’était encore plus à l’époque du livre, où les normes n’étaient pas encore établies… ou très peu respectée).

Points de vente

Pour les points de vente ou lire des articles intéressants sur le livre ou l’auteur, Serge Bouchard (décédé en mai 2021), je vous invite à consulter le site de l’éditeur : https://luxediteur.com/catalogue/du-diesel-dans-les-veines/.

Critique littéraire : Sans Raison…

Synopsis (Amazon)

Je suis dans cette chapelle, avec ma femme et mes deux enfants, je regarde le prêtre faire son sermon, mais aucun son ne me parvient. Je m’appelle Josey Kowalsky et en me regardant observer les cercueils de ma femme et de ma fille, mon père comprend. Il comprend que là, au milieu de cette chapelle, son fils est mort. Il vient d’assister, impuissant, à la naissance d’un prédateur.

Critique de l’œuvre

C’était la première fois que je lisais un Mehdy Brunet, dont j’avais entendu parler sur un groupe Facebook consacré à la lecture. Le titre et le synopsis m’ont tout de suite accroché. C’était un livre qui semblait bien cerné la psychologie profonde d’un personnage troublé, comme sait d’ailleurs si bien le faire Patrick Senécal (ma référence en littérature francophone). D’ailleurs, la façon d’écrire, avec des phrases percutantes sans flafla, exprimées au présent, me rappelait un peu (je dis bien « un peu ») « Contre Dieu » de Senécal. J’appelle ça « écrire en urgence », sans enrober le tout de mousseline rose bien frisotée. Droit au but. Toutefois, le tout s’est quelque peu gâté lorsque le livre devint plus une quête pour trouver les coupables (parenthèse : un mécano père de famille et son père retraité qui deviennent soudainement des as de la surveillance et de l’exécution de criminels, wow !) sans nous plonger profondément dans les sentiments du mari et père éploré qui exerce sa juste vengeance (encore une fois, un peu comme la profondeur psychologique du personnage du père dans « Les sept jours du talion » de Senécal — eh oui, encore lui !). J’aurais aimé savoir ce qui se passe dans la tête de l’homme lorsqu’il sort de sa personnalité profonde pour torturer ces assassins impunis ; il semble que ses seuls « sentiments » soient de fumer comme une cheminée pour passer son anxiété et le stress. Le tout est rempli de filature en voiture, de petits lunchs pris sur le pouce, de petits hôtels pour dormir et non pas de la profondeur que je recherchais au départ en lisant le résumé du livre.

J’ai tout de même aimé ce roman qui ne contient pas de détails inutiles et dont la fin n’est pas si prévisible (bien que je m’en doutais un peu… probablement dû aux années de lecture de suspense derrière moi !), mais crédible.

À l’épilogue, je me suis rendu compte qu’un autre livre suivait ce dernier, mais je ne suis pas intéressée à le lire puisqu’il s’en va dans une direction que je ne recherchais pas en lisant « Sans raison ». Il se peut que mon opinion soit biaisée par la qualité de l’écriture de Senécal et que je considère les autres auteurs francophones du même genre que comme de piètres copies, sans apprécier leurs œuvres à leur juste valeur (phénomène de comparaison que je ne rencontre pas lorsque je lis des auteurs anglophones).

Quelques points de vente (au moment d’écrire cette critique)

  • Amazon.ca
    • Livrel* : 8,99 $
    • Papier : 20,43 $
  • Amazon.fr
    • Livrel* : Non disponible
    • Papier : 9,99 €

* Terme francophone pour e-book et e-reader selon l’Office de la langue française du Québec.

Critique littéraire – La Mort et l’enfant

Synopsis (Amazon)

Atteint d’une maladie cardiaque dégénérescente, Daniel Sullivan n’a plus que quelques heures à vivre. Dans sa chambre d’hôpital à Hartford, il rencontre celle venue le chercher. L’enfant refuse cependant de la suivre sans avoir rien connu de ce monde… […] Aux frontières du drame humain, du récit onirique et du conte, découvrez la fantastique odyssée d’un enfant aux côtés du plus incroyable des guides, la Mort en personne…

Critique de l’œuvre

Premièrement, que dire de la magnifique couverture, qui reflète exactement l’histoire qui nous est présentée ? Sublime !

Ce n’est pas la première fois que je lis un Alexis Arend, qui a décidément un don de sorcier en ce qui concerne la magie des mots. Il sait utiliser des figures de style qui sont courtes et efficaces nous plongeant à fond dans les scènes présentées et qui nous font ressentir les émotions des personnages comme si elles étaient les nôtres. Je me permets de reproduire deux exemples tirés de son livre :

Stacy déglutit et, se redressant en tremblant, parvint miraculeusement à ne pas s’effondrer en pleurs sous les yeux de son fils, ravalant tant bien que mal un sanglot lourd qui lui venait de très loin en elle, raclant chacune des cellules de son corps et charriant avec lui toute la peine à vif et toute la rage gorgée d’impuissance qui torturaient son cœur vaincu de mère et lessivaient son âme meurtrie.

Sentez-vous également dans vos tripes la douleur incommensurable de cette mère qui doit faire face à l’impossible, c’est-à-dire la mort inévitable de son enfant, et qui tente de rester forte à son corps défendant ?

Les réverbères de la grande artère de la ville, postés en sentinelles à intervalles réguliers en précieux remparts contre la nuit, postillonnaient dans le renfoncement constitué par cette étroite ruelle transversale une sorte de lueur jaunâtre, timorée, qui peinait à mordre dans ces ténèbres froides.

On sent la nuit, on sent le froid et la pluie, on sent le danger, non ? Tout ça en quelques lignes à peine.

Ce livre vient nous chercher dans la peine et la douleur du petit Danny qui va mourir, mais également dans l’extase qu’il vit auprès de la Mort, qui l’emmène faire un dernier voyage extraordinaire et significatif. Cela rappelle beaucoup Scrooge dans la dimension du voyage à travers le passé, le présent et le futur, mais aussi les répercussions d’une simple action à la Butterfly Effect. C’est un livre à dévorer du début à la fin pour rester dans l’élan et la profondeur de l’histoire. Vous l’aurez deviné, c’est également une œuvre à saveur fantastique (par exemple, La Mort vit en effet au bout de la galaxie habitable où elle s’assit sur un joli banc de pierre en compagnie du jeune Danny – une image projetée au bénéfice de son jeune compagnon de voyage, on le comprend bien). Toutefois — et même pour ceux qui, comme moi, ne sont généralement pas adeptes de ce genre littéraire —, l’histoire est si bien ficelée qu’on en oublie presque le volet fantastique. Ce n’est pas un livre d’action ou un suspense, mais bien une histoire douce et dure à la fois qui ne nous laisse pas indifférents.

Ce que je trouve toujours un peu rigolo d’Alexis, qui est Français, c’est le fait que ses livres se passent toujours aux États-Unis, mais qu’ils sont écrits avec les expressions de la France. Je dois dire que je ne lis plus de traductions de littérature étatsunienne depuis des années, donc je ne suis plus habituée à ce phénomène, j’imagine.

 Quelques points de ventes

* Terme francophone pour e-book et e-reader selon l’Office de la langue française du Québec.

Critique littéraire sur… les livres interdits! 3 de 3 : La Révolution racialiste (et autres virus idéologiques)

Ce livre de Mathieu Bock-Côté s’aligne dans la suite logique de « L’empire du politiquement correct ». Je suis presque surprise que Bock-Côté n’ait pas été totalement jeté aux lions et retiré de toute conversation publique tellement il dit ce qu’il pense, sans même tenter de mitiger son propos. La dédicace au début du livre donne immédiatement le ton à l’ouvrage : À mon père […], fier Québécois, à qui ne viendrait jamais à l’esprit l’idée de s’excuser d’exister.

Tout d’abord, ce troisième livre de ma série des livres interdits est décidément le plus aisé à lire, plus fluide (j’ai même dû me retenir pour ne pas le lire trop rapidement, voulant absorber chaque section avant de passer à la suivante). J’ai mis quelques références pour certains commentaires, mais je ne pouvais pas toutes les mettre ; j’aurais eu des dizaines de liens rattachés à l’article. Je vous invite donc à faire vos propres recherches ou, mieux encore, vous procurer La révolution racialiste pour vous forger une opinion bien à vous.

Mais, avant de commencer, qu’est-ce qu’un woke, puisque cet ouvrage traite de cette tangente que nous vivons (subissons) depuis quelque temps autant sur les volets politique, médiatique et académique (et qui ne montre aucun signe d’essoufflement) ? Selon l’Office québécois de la langue française, le « mouvement woke » est un « mouvement qui prône une sensibilisation accrue à la justice sociale ainsi qu’un engagement actif dans la lutte contre la discrimination et les inégalités ». Dans l’usage général du français, il sert à désigner « une personne dont le militantisme s’inscrit dans une idéologie de gauche radicale, qui est structurée en fonction de questions identitaires (liées à la race, mais aussi au genre, à l’orientation sexuelle, etc.) » . Bien que ce soit tout de même que récemment que cette doctrine s’est imposée dans notre quotidien, elle s’est en fait échappée des universités américaines et il y a une vingtaine d’années.

Idéologie très noble à la base, si ce n’est qu’elle s’est développée en un mouvement d’extrême gauche demandant (exigeant) la décolonisation de l’Europe et de l’Amérique du Nord ; le seul fait d’être un Blanc dont les origines remontent à plusieurs générations fait automatiquement de nous un raciste, un privilégié, quelqu’un qui devrait avoir honte d’exister et qui devrait s’en excuser jusqu’à la flagellation. Plus encore, c’est nous qui devrions être considérés comme étrangers en notre pays, plus même que les immigrants qui viennent tout juste de s’installer. Bock-Côté explique comment — d’un point de vue woke — le vivre-ensemble est maintenant désuet et pourquoi le racisme envers le Blanc est acceptable, souhaitable, voire obligatoire, pour la survie de l’humanité avec un grand H. « L’homme blanc doit s’immoler symboliquement en se soumettant à un tribunal populaire improvisé ». Une déconstruction de la société est requise, le définancement voire l’abolition des forces de police nécessaire pour un nouveau vivre-ensemble utopique. Je paraphrase ici l’idée générale émise par des gens « sérieux » de la conversation publique. La discrimination positive a atteint un tournant dramatique où la ségrégation des gens sur le simple fait qu’ils sont Blancs est acceptable et encouragée [article]. Ce n’est plus simplement l’égalité que la gauche woke prône, mais bien une revanche historique sur les acteurs du présent, car une « violence institutionnelle contre les Blancs est nécessaire pour que progresse la diversité ». Il est désormais presque de bon ton « de reprocher à quelqu’un la couleur de sa peau au nom de l’antiracisme ». « L’abolition du système raciste passe par l’éradication de la blanchité occidentale ». Ce n’est pas de l’hystérie de la part de l’auteur, il suffit de lire et regarder ce qui se passe dans le monde occidental.

L’idée de l’universalisme (ne pas tenir compte de la couleur de la peau ou de la race des individus) qu’on nous inculquait lorsqu’on était jeune ne serait en fait qu’une utopie, voire un mensonge, qui ne sert que le Blanc pour se déculpabiliser et faire croire à une société ouverte… là encore, c’est une ligne de pensée digne d’Orwell. Comment le fait de séparer les gens par couleur comme une vulgaire pile de linge sale favorise-t-il le vivre-ensemble et l’harmonie ? Je ne vois que de la division, de la haine et du ressentiment. Est-ce que l’abolition de la race blanche est la solution ultime au racisme, comme les « antiracistes » le croient, le crient ? Comment ne serait-ce pas un génocide au même titre que les autres ? Nous sommes littéralement en plein délire.

Cette nouvelle tangente orwellienne me laisse avec beaucoup de questions… Comment une injustice faite sur des acteurs innocents du présent peut-elle réparer les torts du passé ? Pourquoi devrions-nous nous excuser de la couleur de notre peau, avoir honte de nos origines occidentales et nous haïr, comme si les erreurs du passé étaient les nôtres à porter sur nos épaules? [Publication Twitter de l’actrice Patricia Arquette]. Pourquoi serions-nous soudainement coupables d’actes que nous ne cautionnons pas simplement parce que des Blancs ont commis des injustices dans le passé ? C’est carrément une vengeance par procuration. Est-ce qu’on fait monter sur l’échafaud les descendants d’un tueur ou d’un violeur décédé parce qu’il nous est impossible de le punir directement ? Est-ce que nos actions présentes n’ont aucun poids?

Quand je vois des documents de recherches comme A Pathway to Equitable Math Instruction —Dismantling Racism in Mathematics Instructions (traduction : Une voie vers l’enseignement équitable des mathématiques —Démanteler le racisme dans l’enseignement des mathématiques) et Decolonizing Light —Repérer et contrer le colonialisme en physique contemporaine, je me demande si je ne suis pas entrée dans un épisode de La quatrième dimension. Même chose lorsque je vois des wokes monter aux barricades parce qu’une actrice a osé jouer une sorcière ne possédant que trois doigts [article]… c’est être offensé que pour le principe de s’offenser. À ce compte-là, je vais m’offenser de toutes les fois où, au cinéma et dans les séries télé, ils insinuent que les gens se rongeant les ongles sont tous les névrosés psychopathes puisqu’en fait on souffre d’onychophagie.

Et dans les autres virus idéologiques touchés par le wokisme, il y a les concepts de la diversité sexuelle. Être cisgenre est maintenant une tare, désigner son enfant comme garçon ou fille est l’équivalent d’un traumatisme en devenir pour ce dernier, se décrire comme père et mère est complètement dépassé et rétrograde, et s’avouer hétérosexuel devrait être honteux. J’exagère à peine. Un organisme destiné aux enfants transgenres assimile même à un discours haineux l’ancrage de l’identité sexuelle dans la biologie. Je suis très heureuse qu’il y ait maintenant des sites d’information complète sur l’identité des genres pour les jeunes ; ce n’est pas tous les parents qui sont ouverts à avoir un enfant se définissant autrement, on le sait trop bien, et des ressources sérieuses sont nécessaires. Mais sommes-nous obligés d’aller, encore une fois, vers l’extrême et de nous empêcher d’appeler garçon ou fille un enfant se sentant bien dans son corps, comme si renier son identité biologique était le geste d’affranchissement existentiel ultime ?

Un point que je ne partage pas du discours de Bock-Côté est celui de l’immigration comme facteur aggravant de cette révolution racialiste. De mon point de vue, la source du problème n’est pas là (mais peut-être suis-je simplement naïve ?). C’est que le wokisme victimise tous les immigrants en simples racisés qui doivent s’élever contre la suprématie blanche, comme si le Blanc voulait les détruire, les réduire à néant, les asservir, tandis qu’au fond, en tant que peuple, nous ne leur demandons qu’une assimilation et une intégration de base aux codes culturels nationaux. C’est tout simplement du respect envers le pays d’accueil. S’ils ont décidé de partir de leurs contrées, c’est pour un idéal quelconque que nous pouvons leur offrir ; cette offre va de pair avec la culture intrinsèque du pays hôte. Comme le dit si bien Bock-Côté, « il importe de renouer avec la notion de peuple. Un peuple n’est pas une race : on peut y adhérer. On peut s’y fondre. On peut embrasser son destin et s’y intégrer, s’y assimiler ».

Je n’ai jamais été aussi contente d’avoir choisi de ne pas avoir d’enfant, car comment lui expliquer l’inclusion et la tolérance devant les actions et commentaires radicaux de l’extrême gauche qui a envahi presque tous les niveaux de la société occidentale ? Pourquoi faut-il toujours aller dans les extrêmes et devoir absolument désigner un coupable et persécuter les autres au lieu de tenter de vivre en harmonie ? « Le racialisme sépare et exclut, il n’apporte pas de libertés quoi qu’en disent ses hérauts, et, plus dangereux, modélise une manière de penser le monde ». En résumé, on veut faire table rase du passé, se délivrer de l’Histoire, déconstruire pour « mieux » reconstruire une société plus moderne reflétant les saveurs du jour. Car il ne faut pas se laisser berner : ce qui est acceptable et souhaitable aujourd’hui ne le sera plus demain ; c’est le propre de l’humanité, toujours insatisfaite. Est-ce que ce sera pour nous, un jour, qu’un premier ministre vomira de plates excuses et versera quelques larmes de crocodile devant des caméras lorsque la francophonie en Amérique aura été anéantie ?

Critique littéraire : Là où le soleil disparait

Avant-propos

J’ai écrit cette critique en janvier 2017 sans jamais la publier, car il semble que je l’avais oublié dans un petit coin de nuage. Puisqu’il n’est jamais trop tard pour bien faire, je vous l’offre aujourd’hui. Et, au fait, je viens de voir que la version papier est offerte à moins de 7 $ sur Amazon.ca (la version livrel n’était toujours pas offerte). Sautez sur l’offre !

Synopsis (Amazon)

En démarrant ce récit, je savais que les pages du génocide et du massacre de ma famille au Rwanda, en 1994, m’attendaient. Je savais qu’écrire cette douleur passée, c’était mettre des petites cuillerées de pili-pili sur la chair encore fraîche d’une plaie que je voulais à tout prix croire fermée. Et, sur le chemin de la rétrospective, j’ai trouvé d’autres plaies. Vives. Brûlantes. Ce livre, il m’aura fallu presque cinq ans pour le finir.

Pour la première fois, le chanteur Corneille revient sur le génocide rwandais, le miracle de sa survie, son espoir infaillible, ses rêves, l’immense succès qui a été le sien, mais aussi ce long recul, ces dernières années, qui lui a été indispensable pour renouer avec son histoire et ses racines.

Le récit poignant, porté par une écriture d’une rare poésie, d’un artiste, mais surtout d’un homme, à la recherche de sa vérité.

Critique de l’œuvre

C’est une histoire écrite avec humilité, honnêteté et sobriété. Si votre but en lisant le livre d’une personnalité publique est d’assister à un lavage de linge sale en famille, vous serez amèrement déçu. Le premier tiers est consacré à l’enfance de Corneille, qui est né en Allemagne et qui a déménagé au Rwanda à l’âge de six ans. Nous passons ensuite à son adolescence, à sa passion pour la musique et, bien sûr, à sa fuite du Rwanda à la suite du massacre de sa famille. Moments évidemment touchants du livre, où l’auteur nous invite à entrer dans ses souvenirs. Il décrit certes certaines situations graphiquement, mais de manière à la fois sobre et intime. Corneille nous dévoile son parcours professionnel, mais sans ne jamais se laisser prendre au jeu malsain des règlements de compte. Lorsqu’il nous parle de son chemin, de la route parcourue, c’est pour nous dévoiler les blessures profondes qui l’ont empêché d’être réellement heureux malgré son succès. Il nous parle de ses échecs, sans ne jamais blâmer directement qui que ce soit, à part peut-être lui-même, et de ses amours, sa belle Sofia et ses enfants. Il nous parle simplement, nous fait entrer dans ses pensées et partage avec nous ses dialogues fictifs avec son père décédé (qui lui fait toutefois la morale de temps à autre !). Tout au long de notre lecture, nous avons l’impression qu’un ami se confie à nous, en toute intimité. Il est évident (selon ma perspective, du moins) que l’auteur avait deux buts en écrivant ce livre : le premier était une sorte de thérapie, un exutoire, un peu dans le même ordre d’idée que de demander à un enfant de dessiner son cauchemar afin de l’enrayer pour de bon de ses nuits. Ensuite — et il le dit presque lui-même à mots à peine couverts — c’est de tenter de relancer sa carrière. Je ne serai certainement pas la seule à m’être procuré à la fois son livre et son disque le plus connu, « Parce qu’on vient de loin » (en fait, j’ai reçu les deux en cadeau à ma plus grande joie). Combien de gens achèteront ensuite une autre compilation, juste pour voir ? Un des objectifs était très certainement de faire parler de lui à nouveau dans les médias et, peut-être, de revoir certains de ses succès musicaux reprendre la route des ondes radio. Je ne le juge pas d’avoir eu recours à ce moyen pour remonter en popularité ; au moins, lui, contrairement à d’autres, a quelque chose à dire et il l’exprime avec brio. On ressort de cette lecture en nous disant que nous sommes très chanceux. Corneille nous montre que tout est possible, pourvu qu’on sache attraper les opportunités qui se présentent à nous. Il faut croire en nos rêves. Lorsque j’ai terminé le livre, ma première réflexion fut : « on dirait qu’il ne savait pas comment le finir… ». Toutefois, je me suis dit que c’était normal et même honnête envers nous, puisqu’il ne sait effectivement pas où il s’en va avec ce projet. Il ne sait pas ce qu’il veut vraiment faire ensuite. A-t-il tout dit en chanson ? Le showbizness est un métier difficile : tu es adulé et les fans se jettent à tes pieds le lundi, et tu te retrouves à faire de la musique dans un bar de cent personnes qui ne t’écoutent pas vraiment le vendredi. Je ne m’inquiète toutefois pas pour Corneille qui a une résilience certaine et qui, surtout, possède plusieurs cordes à son arc. Il le dit lui-même : il ne fera pas de meilleur disque que son premier et, lorsqu’on écoute des extraits des autres qui ont suivi, on ne peut qu’abonder en son sens. Le premier venait du cœur et des tripes ; les autres sont plus commerciaux et sans distinction particulière. Une belle voix, certes, mais il semble manquer une âme. Corneille nous prouve toutefois qu’il a un talent certain pour l’écriture, et il fera peut-être un jour le grand saut pour une œuvre de fiction, qui sait ?

Médium

Je me suis procuré la version papier (j’entends déjà les : « hein, ben là ! »). D’accord, je suis prolivrel*, mais je voulais mettre cet ouvrage dans ma bibliothèque « échec de l’humanité » et, de plus, il n’était pas offert en format Kindle (incroyable, mais vrai… et pas étonnant au Québec !). Donc, un livre aux pages crèmes et mattes, ce qui facilite la lecture puisque la lumière directe n’est pas reflétée sur la surface. Plusieurs belles pages de photographies sur papier glacé blanc. Couverture sobre comme je les aime (monochrome avec quelques écritures rouges, ce qui n’est pas sans rappeler mes propres couvertures). L’auteur a su jouer avec les types de caractères pour faire une démarcation claire entre les sections de narration et les parties où il dialogue virtuellement avec son père. Puisque c’est un livre de tout de même un peu plus de 300 pages, c’est difficile à tenir à une main tandis que l’autre doit s’occuper du chat ou bien attraper la tasse de thé, mais bon… je voulais juste le spécifier pour passer mon message qu’une liseuse c’est géniale !

Verdict

Un livre à se procurer illico si vous désirez en savoir plus sur le parcours de Corneille et sur sa vision face à la vie en général. Une œuvre qui vous pousse à la fois à l’introspection et à une ouverture sur le monde. Qu’est-ce qu’une augmentation de dix cents à la pompe comparée à des gens ne sachant même pas de quoi demain (ou les prochaines heures) sera fait ?

* Terme francophone pour e-book et e-reader selon l’Office de la langue française du Québec.

** La graphie rectifiée est appliquée à ce texte.

Critique littéraire sur… les livres interdits! 2 de 3 : L’empire du politiquement correct

À la suite de mon expérience de lecture de Nègres blancs d’Amérique, j’anticipais avec une certaine crainte ma lecture de Mathieu Bock-Côté, ayant soudainement un doute sur ma capacité intellectuelle à lire ce genre d’ouvrage. Quel soulagement de voir qu’il n’en est rien (en fait, presque rien… on ne se mentira pas quand même, un dictionnaire est de rigueur !). L’auteur explique obligatoirement certains principes philosophiques, mais de façon structurée et (relativement) simple. Lors de la lecture du premier chapitre, je ne pouvais m’empêcher de penser à 1984 de Georges Orwell, livre auquel je pense souvent. Et voilà, soudainement, l’auteur en fait mention (à plusieurs reprises d’ailleurs au cours du livre) ! Sincèrement, je suggère très fortement de lire 1984 avant de lire L’empire du politiquement correct. Le parallèle que nous expose Bock-Côté entre la réalité du « bienpensant » d’aujourd’hui et celle de l’œuvre d’Orwell de 1958 (un visionnaire) est troublant.

Vient ensuite le chapitre concernant le clivage gauche-droite et tout ce que cela comporte. Il cite certes des philosophes, mais sans insister trop sur le sujet. J’ai trouvé ce chapitre très intéressant, surtout quand on tente d’appliquer le système gauche-droite à sa propre ligne de pensée. Je me permets ici quelques extraits :

« Le clivage gauche-droite se renouvelle […]. Sans cesse, il change d’objet, sans cesse il s’empare d’une nouvelle question à partir de laquelle il divisera la société en deux, en marquant un camp positivement et l’autre négativement. Surtout, d’une époque à l’autre, le clivage gauche-droite peut se déplacer d’une thématique générale à une autre, en se définissant d’abord par l’économie, le social et aujourd’hui, par l’identitaire et le sociétal. »

« Par ailleurs, on constate qu’un homme hier marqué au centre droit passera aujourd’hui à droite, et demain peut-être même à l’extrême-droite, par le simple déplacement du point de gravité idéologique de l’espace public vers la gauche. »

« Être de gauche consiste à avoir raison même lorsqu’on a tort, parce qu’on se trompe alors pour de justes raisons. Être de droite consiste à avoir tort même lorsqu’on a eu raison, car on aura eu raison pour des raisons idéologiques inadmissibles, intraduisibles dans la logique de l’émancipation. »

« Il en est de même de la liberté d’expression dont la défense ne devient légitime qu’une fois qu’elle est reprise par la gauche. En fait, il faut qu’un terme passe à gauche pour devenir légitime […] pour qu’il devienne digne de considération et soit admis dans la conversation publique. »

Malheureusement, le politiquement correct nous force à choisir un camp défini, sans aucune nuance. Nous faisons soit partie des justes soit des vilains. On passe de l’un à l’autre, sans que notre pensée ait réellement changé, car on nous déporte au gré des changements du jour.

Bock-Côté a bien su cerner adéquatement l’arrogance complaisante du Canada qui se considère maintenant, par sa politique du multiculturalisme extrême, non seulement comme le meilleur pays du monde, mais également comme le représentant de la prochaine étape dans l’histoire de l’humanité.

« […] l’identité national serait un refuge imaginaire qu’il faudrait déconstruire pour que s’expriment enfin des sociétés plurielles. La trace du peuple devrait être effacée pour qu’on ne la retrouve plus. »

En fait, toute réalité historique relativement au peuple est considérée comme racisme, point final. C’est le multiculturalisme total ou rien du tout. Les zones grises sont proscrites. Comme le dit l’auteur (je résume ici librement son propos qui s’étend sur plusieurs sous-sections), le politiquement correct s’est « scientifiquement » radicalisé, déclarant que toute civilisation, peu importe les barbaries qu’elle commet contre les droits de l’homme, est conforme au droit de sa propre identité, contrairement à ce qui concerne les civilisations européenne et américaine, qui n’ont de droit que de s’effacer et de s’excuser bien bas d’exister, et dont l’identité est frappée « d’illégitimité congénitale ». La haine de l’Occident est acceptable, légitime et encouragée. La conscience historique des peuples occidentaux n’est rien d’autre qu’une entreprise exterminatrice à grande échelle, ce qui obligerait la civilisation occidentale à un repentir permanent.

J’ai trouvé qu’il y avait, à quelques endroits, un peu trop de référence à la France et à leurs philosophes et j’aurais aimé que ces passages soient plus axés sur ce qui se passe au Québec (et probablement qu’en retour, les Français diront qui s’y retrouve trop du Québec et du Canada et pas assez de la France !). Toutefois, cela s’explique probablement par le fait que, comme l’explique l’auteur, c’est en France que ce type débat identitaire est le plus intellectualisé. La majeure partie des autres chapitres traite plutôt de l’Amérique du Nord (en grande partie du moins).

Quelques sections étaient un peu trop philosophiques à mon gout ; elles alourdissaient le texte et tenaient plus du théorique que du concret, principalement le chapitre six (Le sentiment de la fin d’un monde ou la criminalisation de la nostalgie), qui était heureusement assez court. Cependant, c’est plutôt habituel pour un ouvrage de ce genre et ça ne m’a pas empêché d’apprécier la majeure partie de l’œuvre. Notez que je ne marque qu’ici que ma propre préférence.

Bien que ce livre soit pour monsieur et madame tout le monde (et les autres — restons politiquement corrects tout de même !) ayant un minimum d’éducation, ce n’est quand même pas une lecture légère. Cela dit, cet ouvrage dépeint bien notre réalité, où nos efforts pour éliminer toute forme de raciste ou de discrimination se sont transformés en intolérance. Le multiculturalisme qui devait pourtant nous rallier nous a ghettoïsés au sein d’une société où le racisme antiblanc est considéré non pas comme du racisme, mais comme un droit légitime. Une société où un traducteur blanc n’a pas le droit de traduire le poème d’une femme noire [article ici] — puisqu’il s’agirait là d’une appropriation culturelle —, où un dramaturge blanc n’a pas le droit de mettre en scène une pièce parlant d’esclavage [article ici], où une journaliste blanche ne peut pas mentionner le mot « nigger » (dans le cadre d’une citation) ou même mentionner le titre de l’œuvre « Nègres blancs d’Amérique » dans des réunions de travail [article ici], et plusieurs autres exemples dont certains cités par Bock-Côté, comme le retrait d’un cours de yoga par l’Université d’Ottawa, car cette activité constituerait de « l’appropriation culturelle » d’une pratique spirituelle de l’Inde [article ici]… Quand on dit que le ridicule ne tue pas…

Je me permets de sortir du contexte de cette critique pour citer Richard Martineau dans son article « L’obsession identitaire tue le vivre-ensemble » [article ici], une phrase qui résume bien la situation :

« On n’a jamais autant parlé de vivre-ensemble, mais on n’a jamais autant vécu séparés, chacun dans son coin. »

J’ai bon espoir qu’avec le temps tout le monde finira par mettre de l’eau dans son vin (sauf à la SAQ et au LCBO j’espère !) et comprendra que le vivre-ensemble n’est pas constitué de la haine de la majorité (qu’elle soit raciale ou identitaire), mais bien de l’abolition de toute forme de discrimination envers les autres sans pour autant éliminer toute forme d’attache culturelle ou identitaire. Il faut aller vers le futur sans tenter pour autant de détruire et de déconstruire le passé qui nous a forgés.

Je laisse le dernier mot à Mathieu Bock-Côté :

« Il importe […] de ramener la démocratie sur terre, de la reconstituer comme un espace de délibération dont les finalités ne sont pas prédéterminées par les gardiens autoproclamés du pensable et de l’acceptable. »

Critique littéraire : Les villages de Dieu

Synopsis (provenant d’Amazon) :

Retranchées dans des cités qui tirent leur nom de la légende biblique – Puissance Divine, Bethléem – des gangs de bandits pillent, violent et assassinent, en toute impunité. Celia, adolescente, cherche à survivre, tantôt en se prostituant, tantôt en faisant la chronique des femmes de la cité sur les réseaux sociaux, où elle devient influenceuse. Les villages de Dieu dit l’effondrement et la banalité du mal dans cette ville de Port-au-Prince livrée à ses démons.

Critique de l’œuvre

Non, ce livre n’est pas religieux, bien qu’il soit en effet plutôt loin de mon style de lecture habituel. J’ai acheté ce roman en version électronique après avoir lu un article de Dany Laferrière paru à la suite de l’assassinat du président haïtien. Bien que ce soit à la base un roman, l’autrice, Emmelie Prophète, nous transporte dans la réalité des bidonvilles de Port-au-Prince où la vie passe sans réel espoir, sans ambition autre que celle de survivre au mieux. Ce roman est écrit avec à la fois une urgence dans le texte, une impatience accompagnée d’une douce résignation. Il nous décrit le quotidien de gens certes fictifs, mais le sont-ils vraiment ? Quelque part, ce coup d’œil dans la vie de Celia est empreint d’une dure réalité.

Durant ma lecture, j’ai fait de petites recherches sur le présent d’Haïti — des photographies, des promenades en « GoPro » au centre-ville de Port-au-Prince, des articles qui semblent tout juste sortis du roman tellement ils dépeignent une réalité similaire — et je me suis trouvée EXTRÊMEMENT privilégiée de vivre ici, dans un environnement sécuritaire et propre, où je peux me promener sans avoir peur de finir sur la trajectoire d’une balle perdue.

Verdict C’est un livre à lire pour découvrir tout au long du récit fictif de Celia et de ses voisins la réalité que vivent les Haïtiens, certes, mais également — on peut le supposer sans risque d’erreur, je crois — d’autres peuples pour lesquels il semble que la vie est pénible dès la naissance, où la misère n’est pas un état temporaire, mais un quotidien, une normalité. On ne parle pas ici d’un coup dur, mais bien d’une existence complète dans la pauvreté, la violence, le désespoir. Un livre poignant à lire absolument.

Critique littéraire sur… les livres interdits! 1 de 3 : Nègres blancs d’Amérique

Tout d’abord, ce livre doit se lire en gardant à l’esprit deux faits : premièrement, l’auteur a rédigé ce livre dans un court laps de temps en étant incarcéré dans une prison étatsunienne où il écrivait debout (appuyé sur le lit de l’étage supérieur) durant des heures à la musique très peu reposante des cris et du brouhaha constant. Deuxièmement, il est écrit par un jeune révolté de la génération du duplessisme et de révolution tranquille.

Deux préfaces écrites à quelques années d’intervalle, un avertissement de l’auteur et une présentation, on finit par avoir hâte que le livre commence comme tel (ou bien on se demande pourquoi on l’a acheté finalement !). L’auteur nous peint une histoire de la colonisation bien différente de ce que nous avons appris à l’école, c’est le moins que l’on puisse dire. Ce n’est toutefois pas nécessairement erroné ; les historiens nous disent bien ce qu’ils veulent bien nous dire selon leurs convictions — personnelles et politiques — et le but recherché par leur analyse. J’ai apprécié particulièrement la partie où l’auteur nous brosse un portrait honnête de son enfance, de son arrogance et de son égocentrisme face au jugement qu’il a sur ses parents et sur ses concitoyens d’infortunes. C’est une partie de l’histoire moderne du Québec qui n’est pas enseignée ; on doit lire des ouvrages — biographiques ou bien fictifs, mais basés sur l’histoire réelle — pour comprendre à quel point le Québec s’est développé tout de même rapidement entre les années 40 et 70. Toutefois, l’auteur m’a ensuite perdu avec des descriptions de différentes philosophies qui l’aidèrent (ou non !) à se comprendre et comprendre le monde qui l’entoure (j’ai même sauté presque tout un chapitre traitant de différentes théories philosophiques), ce qui me fit me poser la question suivante : cet homme était-il capable de penser par lui-même ou bien avait-il absolument besoin que d’autres personnes lui soufflent les réponses ?

J’en retiens que l’auteur était un homme éternellement insatisfait qui voyait seulement le négativisme qui l’entourait au lieu de tenter de transformer sa vie et celle de ceux qu’il côtoyait positivement et de se consacrer à ses études (même si les professeurs et les matières enseignées l’emmerdaient – il était tout de même un privilégié de pouvoir étudier) au lieu de passer des soirées à discuter inutilement de préceptes philosophiques et poétiques tout en crachant sur ses parents comme s’ils étaient de la crotte de chien sous un soulier. Ce n’est pas compliqué, il crache sur tout le monde : ceux qui sont nés avec une cuillère en argent dans la bouche, ceux qui ont réussi à s’élever au-dessus de leur condition à la sueur de leurs fronts, ses parents qui font du mieux qu’ils peuvent pour survivre tandis que lui, il s’invente une utopie irréalisable avec de grands principes théoriques sans même fournir une ligne de pensée concrète à savoir comment une telle société « idéale » pourrait fonctionner dans la vie de tous les jours. Il sauta d’une théorie à l’autre et se fit une nuisance de lui-même au lieu de créer un monde meilleur selon ce que LUI voulait changer. Ceci est mon opinion très personnelle, mais je n’ai aucun respect pour les beaux parleurs qui ne travaille pas à bâtir une société meilleure et qui ne pense qu’à la transformer aux moyens d’actes terroristes. Nous pouvons à la limite comprendre de tels gestes au sein d’un brutal régime dictatorial, mais pas au sein d’une démocratie — aussi imparfaite soit-elle — lorsque d’autres moyens s’offrent à nous ? C’est peut-être moins rapide et plus ardu d’y aller avec les moyens politiques du bord, mais je ne vois pas comment il espérait que ces actes terroristes aideraient LA cause.

En conclusion, ce livre m’a profondément déçu, peut-être parce que j’avais de trop grandes attentes — moi la profane de toutes théories philosophiques — sa renommée l’ayant précédé. Aussi, peut-être ai-je en cours de lecture les deux faits importants mentionnés en introduction, c’est-à-dire que c’est un livre engagé et, de ce fait, qu’il nous offre que la vision propre au but de l’écrit, et qu’il a été rédigé dans des conditions loin d’être idéal pour un ouvrage de cette profondeur.

Nouvelle : Le lointain royaume des dunes

« En garde ! »

            Ce cri, je le jetai à un ptérodactyle fonçant sur moi à toute allure. En vain. Malgré mon ordre, pourtant proclamé avec autorité, il ne put résister à l’envie de chair fraiche et me frôla juste au-dessus de la tête en écorchant mon dos de ses griffes, me faisant perdre mes lunettes dans le processus. C’était la première fois que je m’éloignais de mon cher royaume pour me retrouver dans les dunes sablonneuses du pays interdit qu’on appelait « le lockout ».

            Mais je m’égare et vous entraine à la fin d’une aventure extraordinaire de plusieurs heures, qui s’amorça au début d’un après-midi ensoleillé du mois de juillet, il y a de ça très longtemps.

Nous commençâmes donc notre périple à la lisière du bois, en nous défiant vigoureusement à l’épée. La raison de notre mésentente reste inconnue et d’une importance mitigée. Il y avait le trésor des ogres, bien sûr, mais aussi le désir de sauver la princesse aux longs cheveux blonds, aux lèvres pulpeuses, au décolleté plongeant et aux jeans savamment déchirés (tiens, tiens… notre grâce en détresse ressemblait à s’y méprendre à Samantha Fox, qui l’eut cru !). Je dois avouer qu’en tant que Dame Caroline, et bien que je fusse également un chevalier aguerrit (ou est-ce chevalières ? Peu importe au fond !), ce désir de devenir le héros du jour pour la belle en danger était plus du gout de Sir Daniel que du mien. Perso, j’y étais plus pour le magot et l’aventure ; la poufiasse, je n’en avais rien à cirer. Donc, malgré mon trou de mémoire sur les raisons intrinsèques de cette discorde, c’était sans contredit l’appât du gain qui nous faisait nous entretuer en dépit de notre lien filial. Notre duel prit toutefois un tour inattendu à l’instant où des trolls, la première ligne de défense des ogres, cherchèrent à nous coincer sur le bord d’un précipice. Très peu d’options s’offrirent alors à nous afin d’échapper à une mort atroce certaine; nous jetâmes un coup d’œil vers le profond gouffre : le chemin étroit couvert de glaise et d’eau ruisselante nous défiait de tenter notre chance dans cette direction… et de risquer de passer le reste de nos vacances avec une jambe plâtrée. En contrebas, des branchages épineux dansaient une valse scintillante avec le ruisseau, éclairé périodiquement par les rayons du soleil se faufilant à travers les cimes, transformant la noirceur des profondeurs en rivière de diamants. Les carcasses de voitures rouillées détournant le courant apportaient une touche sinistre à ce parcours tortueux qui ne semblait pas de tout repos. Qui sait, un gnome se vautrait peut-être sur un siège ou bien sur le plancher. Pourquoi prendre le risque de mourir désarticulé ou bien empoisonné ? À cet instant, un sorcier nous aurait bien été utile.

            Dépourvus de cet atout magique, nous regardâmes dans toutes les directions et trouvâmes enfin un petit sentier sinueux à travers la dense forêt. Sans même penser aux dangers qui nous guettaient par-delà les terres connues, nous nous lançâmes dans une course effrénée, évitant de justesse les obstacles se jetant sur notre parcours, usant de toute notre adresse pour éluder les méchantes fées tentant de s’accrocher à nos cheveux.

            C’est alors que mon cousin se prit le pied dans une racine et s’écorcha vilainement le genou.

            « Allez, Sire Daniel ! Ne traine pas ! »

            Il se releva péniblement, s’inquiétant quelque peu de son short neuf maintenant tâché de terre et d’herbe, et nous nous remîmes en route en nous enfonçant toujours plus loin de notre royaume. Est-ce que la mère de Sir Daniel rougirait de colère en voyant le dégât ? Cette question épineuse ne perdura que quelques secondes ; nous devions rester alertes et n’avions pas le luxe de nous égarer vers des pensées aussi frivoles, car toute notre vigilance était requise. Il n’y avait pas âme humaine à proximité ; que des oiseaux, des insectes, et les êtres étranges qui peuplaient ce monde enchanté que nous bâtissions au gré de nos fantaisies.

            Soudainement, au détour du chemin, nous arrivâmes au pays interdit, et ce, sans rencontrer aucune autre force hostile à notre quête. Cet endroit que nos frères avaient conquis à dos de motocross, mais qui était hors des limites acceptables du royaume des jeunes chevaliers que nous étions. Je réalisai alors que j’étais loin… trop loin. La peur me prit au ventre et c’est là, au moment où je m’y attendais le moins, à l’instant où nous longions l’orée de la forêt, que l’attaque du ptérodactyle s’abattit sur moi. Une des lentilles de mes lunettes tomba par terre, la minuscule vis introuvable sur le sol couvert de feuilles et de branches. Que dirait ma mère lorsqu’elle apprendrait que j’avais cassé mes lunettes au cours de ma toute première escapade de l’été ? Je me mis soudainement à pleurer, fatiguée de cette course à travers les bois et incapable de voir correctement devant moi, en voulant à mon cousin d’avoir fait tomber mes lunettes et pincé durement mon dos pour imiter la griffure de la méchante bête. Bien que notre cavale vers le lookout nous eût paru d’une durée plutôt brève, nous nous étions éloignés beaucoup plus qu’anticipé. Ce sont deux enfants sales, épuisés et constellés de piqures de moustiques et de mouches noires qui sortirent de la forêt après des heures de vagabondage. Nos parents étaient dans tous leurs états, hésitant entre nous gronder, et même — oh sacrilège — nous donner une bonne fessée pour la frousse immense que nous leur avions fait subir, et nous serrer dans leur bras, heureux de nous retrouver sains et saufs. Les livres dont vous êtes le héros nous avaient apporté près de cinq heures d’aventure… et nous procureraient encore de nombreux moments fabuleux durant les jours de pluie et de mauvais temps, lorsqu’il n’y avait rien d’autre à faire à la campagne que de nous plonger dans nos livres-jeux, à vivre de nombreuses péripéties à l’abri des dangers réels.

            Ce souvenir que je considère maintenant comme si précieux, soit celui de la première fois où je découvris la carrière de sable mythique dont mon grand frère me parlait avec délice, est accompagné de la première fois que je réalisai en tant qu’adulte que cette jeunesse où seuls les dragons, les trolls, et autres bêtes fantastiques comptaient, était en fait une époque révolue, celui où deux enfants pouvaient parcourir la forêt sans surveillance parentale, sans craindre qu’un pédophile ou bien un meurtrier se faufile au détour d’un arbre ou d’un sentier pour transformer leur après-midi de rêve éveillé en cauchemar véritable, leurs corps meurtris jetés sans cérémonie dans un fossé. Celui où nos étés n’étaient pas occupés à jouer à des jeux vidéos, à texter ou bien à surfer sur les médias sociaux. On finissait nos journées en étant crasseux, écorchés, épuisés — et constellé de piqures d’insectes, sans même se soucier une seconde du virus du Nil occidental ou bien de la maladie de Lyme —, mais nous dormions du sommeil du juste en sachant que les ennemis combattus étaient fictifs, que nous ne risquions pas de devenir victimes d’un monstre de chair et de sang, bel et bien humain, comme nous.

            Et maintenant, j’apaise mon sommeil troublé des crimes de cette humanité malsaine et polluée en me rappelant, avec une douce nostalgie, que j’ai un jour survécu à l’attaque d’un ptérodactyle, dans le lointain pays des dunes sablonneuses.